Offrir ou s’offrir un livre


Offrir ou s’offrir un livre

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Ce n’est pas la première année que Brother n°1 se prête à ce jeu, souvenez-vous, il vous avait déjà préparé une sélection de livres il y a 3 ans. Toujours dans l’idée de vous faire découvrir cet univers qui le ravit, et de vous donner quelques pistes de lecture à s’offrir ou à offrir, celui-ci vous a préparé la critique de livres et revues préalablement choisis avec soin. Une sélection qui arrive à point nommé, juste après celle sur les pulls moches que je vous proposais mardi (je vous laisse deviner lequel de nous 2 est tombé dans la marmite quand il était petit).

Sans plus vous faire patienter, je vous invite à vous laisser guider, et vous souhaite de passer un moment aussi agréable que fût le mien à la lecture de ce billet.

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C’est la dernière ligne droite et le réservoir d’idées de Noël est épuisé. On se dit : « pourquoi pas un livre, c’est toujours agréable ? », puis quand on rentre dans sa librairie préférée, on se rend compte que ce n’est pas si facile. Comment dénicher la pépite noyée dans les kilomètres de rayonnage ? Comment sortir un peu des sentiers battus pour choisir le bouquin qui fera mouche ? Heureusement, je suis là pour vous souffler à l’oreille quelques titres originaux, publiés par des éditeurs amoureux des belles histoires, bien construites et bien écrites. Cette année, il ne s’agit pas seulement de romans, on va aussi parler revue, novellas, recueil de nouvelles, saga, travail scientifique… Parce que oui, c’est aussi ça, l’originalité. Petit péché de ma part, encore une fois, il ne s’agit que d’auteurs français.

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Vostok

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À tout seigneur tout honneur, cette année encore, je vous présente un roman de Laurent Kloetzer, auteur entre autres des excellents et bouleversants Anamèse de Lady Star et C.L.E.E.R., une fantasy corporate. Cette fois-ci, Laurent (sans son épouse Laure avec qui il avait coécrit les deux ouvrages cités juste avant) nous transporte dans un futur proche, ou plutôt nous ramène dans l’univers d’Anamnèse, un peu avant les événements qui y sont décrits. Les connaisseurs seront donc replongés dans l’ambiance technofuturiste de ce monde à l’aube d’un grand bouleversement, et les néophytes, quant à eux, ne seront pas perdus puisqu’il n’est nullement nécessaire d’avoir lu le premier roman pour comprendre le nouveau. Toutefois, ce n’est pas cette translation dans le temps qui est intéressante, c’est surtout celle dans l’espace, puisque Vostok est le nom de la station russe en Arctique, et c’est sur ce continent glacial et hostile que le gros de l’histoire va se dérouler. Pour faire simple, un groupe de chercheurs est envoyé dans cette station abandonnée pour retrouver la séquence ADN d’une bactérie que les scientifiques russes avaient découverte à des milliers de kilomètres sous la glace, le tout afin de s’en servir comme mot de passe pour accéder à… Je n’en dis pas plus. Oui, c’est du Kloetzer, donc oui, c’est compliqué. Pour autant, j’ai adoré la justesse des  émotions et des sensations : le froid, la solitude, l’isolement, le doute… Entre les chapitres, l’auteur donne vie à la dernière expédition russe des années 90. Le mélange entre le réel et l’imaginaire fonctionne à merveille, l’intrigue est bien menée, la chute intéressante, le divertissement garanti.

Conseillé si on veut offrir un bon roman. On préférera dans ce cas la première édition, chez Denoël, à celle, plus récente, chez folio SF en poche. Pour ceux qui ne sont pas (ou ne sont que trop) convaincus, sachez qu’on reparlera de M. Kloetzer un peu plus bas.

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Bifrost

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Un abonnement à une revue, c’est bien aussi, non ? Un cadeau tous les deux mois, c’est en quelque sorte une manière de faire durer la magie de Noël toute l’année. Il va falloir que je fasse preuve d’un peu d’objectivité tant je suis accro à Bifrost. Déjà, comme dirait Foch, de quoi s’agit-il ? Bifrost est une revue bimestrielle éditée par les éditions du Bélial, spécialisée dans les littératures de l’imaginaire au sens le plus large (d’où l’usage du pluriel). Un numéro de Bifrost, c’est cent-vingt pages, dont trois nouvelles, une étude presque exhaustive de toutes les publications récentes, un dossier très détaillé sur un auteur majeur, des éditos, et un article final mêlant science et fiction (toujours écrit par l’excellent Laurent Lehoucq qu’on retrouvera plus bas (notez au passage le nouvel emploi de ma tactique d’écriture qui permet de conserver votre attention pour encore un paragraphe)). La revue est très accessible, le ton est relativement léger, on sent bien que c’est écrit par des passionnés qui sont aussi de fins connaisseurs du monde de l’édition et de la littérature en général. Gare à l’imprudent qui plagiera GoT histoire de se remplir les poches grâce à une saga en soixante tomes mal écrite ou mal traduite. La critique des chroniqueurs sera sans appel. Car oui, Bifrost donne son avis, qu’elle aime ou qu’elle n’aime pas. Et certains se font dézinguer à chaque fois. Et toujours à raison soit dit en passant. S’agissant des dossiers, certains sont plus intéressants que d’autres, selon que l’on connaisse l’auteur présenté ou non. Grâce à cette revue, j’ai découvert Yves et Ada Rémy, et, devinez quoi, on en reparle plus bas !

Conseillé comme cadeau pour les hard-lecteurs de littérature de l’imaginaire. Mais renseignez-vous avant, il se peut qu’ils soient déjà abonnés !

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Spire

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Spire, c’est un beau cadeau. Pourquoi ? Déjà c’est parce que la saga s’étire sur trois tomes, et que ça fait mieux d’offrir trois livres qu’un seul. Là, vous vous dites : « une saga… Mais, si je me souviens bien, ne nous avait-il pas dit dans sa précédente chronique qu’il détestait les sagas ? ». Et vous auriez raison. Heureusement, il est des histoires qui ne perdent pas à être séquencées. En tout, Spire compte mille pages peu ou prou, ce qui reste raisonnable. Que dire sur Spire ? Déjà, sachez que comme quasiment tout ce qui naît sous la plume de Laurent Génefort, l’histoire se déroule dans l’univers jonché des portes de Vanck (qui permettent de voyager dans l’univers sans qu’on sache ce qu’elles font ici ni qui les a construites). On a donc affaire à un roman de space-opéra (qu’est-ce que je n’aime pas cette appellation !) conforme à ce qu’écrit d’habitude cet auteur assez prolixe, beaucoup plus proche cependant des excellents Mémoria ou Les peaux-épaisses que du cycle d’Omale (dont on ne reparlera pas plus bas. Devinez pourquoi ? C’est une saga. Bon, c’est bien quand même, mais je confesse que j’ai craqué avant la fin). Ah, vous vous dites, space-opéra donc il va y avoir des batailles de vaisseaux spatiaux, des piou ! piou ! piou ! laser bleu et rouge, des méchants très méchants qui veulent conquérir le monde… Eh bien non, et c’est là toute l’originalité de ce roman. On parle de vaisseaux spatiaux, certes, mais de vaisseaux de commerce ! Car Spire est le nom d’une compagnie marchande, dont l’originalité est de ne ravitailler que les mondes isolés, délaissés par les grandes compagnies à cause du manque de rentabilité de ces routes commerciales. Les navigateurs de la Spire sont un peu des idéalistes, s’ils ne perdent pas de vue l’essence même de ce qui fait l’originalité de leur compagnie. Vous l’aurez compris, de péripétie en péripétie, la Spire évolue, comme le souligne les sous-titres des trois romans : ce qui divise, ce qui relie, ce qui révèle. Pour en avoir discuté avec l’auteur (oui, je me la pète, mais sur le coup, je faisais moins le malin), il s’est inspiré de l’histoire de l’aéropostale après la Grande Guerre. Le résultat est vraiment saisissant.

Conseillé à ceux qui veulent faire un beau cadeau, sûr de faire mouche. Je pense qu’un public adolescent pourrait y trouver une bonne porte d’entrée à l’univers des Vanck. C’est Critic qui publie la saga, et les couvertures sont très jolies.

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Focus Laurent Lehoucq

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Alors là, on va parler de quelqu’un que je trouve impressionnant. Sachez pour commencer que M. Lehoucq n’est pas qu’écrivain. Avant tout, il est astrophysicien au commissariat européen pour l’énergie atomique. Wikipédia nous apprend aussi qu’il donne des cours d’astrophysique stellaire à l’école polytechnique (oklm le gars pose le game d’entrée). Mais bon, en plus d’être une tronche, il a un vrai talent, celui de rendre les concepts théoriques qu’il maîtrise au quotidien accessibles et compréhensibles. Sa spécialité, c’est la vulgarisation scientifique. Enfin, quand je dis vulgarisation, c’est à prendre avec des pincettes. Disons qu’il répond avec brio à toutes les grandes questions que se pose un véritable lecteur de science-fiction. Peut-on voyager dans l’espace ? Le corps humain serait-il viable dans l’infiniment petit ? Quelle pile faut-il pour faire fonctionner un sabre-laser ? Toutes ces questions et bien d’autres, M. Lehoucq les aborde dans la kyrielle d’ouvrages qu’il a écrits ou coécrits. De même, on retrouvera sa prose aiguisée et impertinente à la fin de chaque numéro de Bifrost. Voyons ce qui pourrait vous intéresser. Tout d’abord, probablement le plus accessible du fait de son titre et de son thème, Faites des sciences avec Star Wars est un divertissement intéressant, qui aborde les problématiques propres à l’infiniment grand. Il y est question d’énergie, de vitesse… toujours en étudiant de près ce que nous montrent les films. C’est intéressant. Mais à mon avis, pas le meilleur. SF, la science mène l’enquête est bien plus chouette. Notez qu’il s’agit d’une compilation des articles de l’auteur dans les premiers Bifrost (jusqu’en 2007). Là, les sujets abordés sont plus éclectiques. On s’initie à la relativité, au voyage dans le temps… C’est magistral. Hélas, le livre chez les éditions du Pommier n’est pas un bel objet. C’est dommage. On lui préféra La science fait son cinéma, publié ces derniers jours au Bélial, servi par une couverture soignée et une mise en page digne du contenu. Je ne l’ai pas lu, mais il fait partie de mes achats indispensables de 2019. La liste n’est pas exhaustive, mais vous pouvez sans crainte piocher au hasard de ce qu’écrit ce monsieur, c’est fascinant. Honnêtement, il m’arrive de ne pas pouvoir dormir après avoir refermé un de ses livres, tellement il nous invite à la réflexion.

Conseillé pour celles et ceux qui côtoient quelqu’un qui, au petit-déjeuner, vous pose ce genre de questions : « tu sais que quand une pomme tombe d’un arbre, en fait, elle ne fait que retrouver le mouvement normal de toute chose – la chute libre – et que c’est en fait le sol qui accélère vers elle ? » et, tout de suite après :« alors tu te demandes pourquoi dans ce cas la Terre n’est pas en extension, si le sol accélère de toute part ? Eh bien moi non plus, faut que je finisse le chapitre ce soir sinon je vais devenir fou. »

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Le temps de Palanquine

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Un roman, maintenant. Le temps de Palanquine, de Thierry Di Rollo. Au Bélial, vous l’aurez compris. Non, sans déconner, ces gens font un travail remarquable. Vraiment. De l’auteur, je n’ai lu que quelques nouvelles et son roman Drift, que j’avais vraiment apprécié (original, juste, bien écrit… il fait le job). Sa bibliographie est bien plus complète et verse dans d’autres registres. Ici, dans Palanquine, il est question de voyage dans le temps, thème particulièrement sensible pour moi, car j’adore le voyage dans le temps. Le traitement qui en est fait ici est très original. Imaginez qu’une exoplanète fonce vers la Terre et qu’on se rende compte qu’il manque quelques années pour développer la technologie permettant de la dévier. Hop, on s’infiltre dans le passé, on donne des coups de pouce par-ci par-là et on fait gagner quelques précieuses années aux scientifiques. Si tout était aussi simple… Très vite, on se rend compte que ça ne marche pas. Et Palanquine se rapproche. La Terre meurt, la folie guette. De moins en moins sont volontaires pour le grand saut. Que se passe-t-il ? Je ne peux pas aller plus loin sans ruiner le plaisir de la découverte. Le roman est assez court, se lit bien. Il est dur, parfois cru, violent, mais au moins ce n’est pas édulcoré et tamponné « tout public ».

Conseillé pour ceux qui veulent offrir un livre rare et original. Réservé à un public adulte à cause de la gravité du propos (et pas pour d’autres raisons). Cela n’est pas du tout une tare, au contraire, ça fait du bien de lire quelque chose pour les grands.

 

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Focus une heure lumière

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Une heure-lumière, c’est une collection du Bélial qui a maintenant une paire d’années et qui dénote dans le paysage éditorial. Non, je ne suis pas sponsorisé, c’est juste que ces gars-là sont en pointe, y’a pas à dire. Alors, une heure lumière, c’est quoi ?, me demandez-vous. Ce sont des petits livres au format poche, à la couverture blanche complétée par des illustrations nébuleuses tout en dégradé de bleu plutôt jolies, d’une grosse centaine de pages au maximum. Autant que le dernier Amélie Nothomb, mais en trois fois moins cher. On parle, pour ce format d’histoire, de novella. La collection est assez étoffée, une petite vingtaine d’ouvrages, regroupant des textes originaux d’auteurs contemporains anglo-saxons (Ken Liu, Stephen Baxter, Greg Egan…) et français (Thomas Day, Laurent Kloetzer, Christian Léourier…). On parle ici de science-fiction dans son interprétation la plus large, space-opéra, voyage dans le temps, anticipation… Tout le registre y passe. Moi qui aime les formats courts que je trouve plus percutants, plus nerveux, je n’ai pas été déçu. J’ai lu Cérès et Vesta, qui m’a rappelé de très loin l’excellente série The expanse (en moins bien, je sais pas pourquoi, cette histoire de famille, j’y ai pas cru…), le sultan des nuages qui est une histoire se déroulant sur Vénus, avec des personnages attachants, l’homme qui mit fin à l’histoire, ou comment voyager dans le temps permet de mettre à jour les atrocités oubliées de l’histoire du japon en Chine (là, on est sur un texte de très haute volée) et Issa Elohim de Laurent Kloetzer, dans l’univers d’Anamèse, texte magistral que j’ai fait lire à quelqu’un-qui-n’aimait-pas-la-SF et qui est resté scotché. Pour les autres, je ne doute pas qu’il s’agisse de très bonnes novellas, toutefois mes finances ne sont pas illimitées.

Conseillé par lots de trois pour caler entre deux gros paquets sous le sapin. Il y en a pour quelques heures de lecture à peine, mais on en a pour son argent.

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Les soldats de la mer

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Je finis par un recueil de nouvelles qui, contrairement à tous les textes proposés jusqu’alors, n’est pas une édition originale, mais une réédition. Les éditions Dystopia ont ressorti de leurs cartons le magnifique recueil coécrit par Yves et Ada Rémy, les soldats de la mer. Ici, il est davantage question d’imaginaire que de science-fiction. Les époux Rémy nous embarquent dans une série de nouvelles sans lien les unes avec les autres si ce n’est de se dérouler à une époque que je situerais entre 1730 et 1830. Certains disent « napoléonien », pour moi, on retrouve quand même un environnement technique et sociétal proche du règne de Louis XV par endroit. Et donc, dans cette France pré-industrielle, mais où la magie imprègne le quotidien, on suit les aventures de soldats dans une forêt, de vampires, de sirènes… À écrire ces mots, je trouve que je suis réducteur, car c’est avant tout de l’émerveillement que va ressentir le lecteur, si bien que le titre un peu belliqueux, je trouve, ne fait pas honneur à l’ensemble des textes. Nulle histoire de guerre et de batailles, hormis en fond de trame sur certains textes. Ce sont des histoires de soldats, d’aventuriers, pas d’armées en vadrouille comme on peut en trouver mille sur les tables de librairie. Il faudra attendre la dernière nouvelle pour comprendre le pourquoi du comment de l’enchevêtrement du réel et de l’imaginaire dans cette époque, et je dois bien avouer que je n’ai pas été déçu. C’est beau, c’est bien écrit, ça fait rêver, on se sent bien à la fin de chaque texte.

Conseillé pour ceux qui ont envie de faire rêver un peu, de faire un cadeau un peu timide, mais très personnel. Un coup de cœur, quoi.

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Voilà, c’est tout pour cette chronique. Je suis preneur de vos trouvailles à vous, vous avez compris les conditions : imaginaire, en français et en un seul tome ! Bonne lecture et à bientôt !

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Merci Frangin 🙂


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